Je reviens de mourir
J'ai déjà parlé d'Antoine Dole ici. Et là. Et j'en parlerai encore : j'ai fini Laisse brûler. Je commence donc à être pas mal sur sa bibliographie. Surtout, je commence donc à connaître son écriture, et aussi à pouvoir comparer ses oeuvres entre elle.
Tout comme K-Cendres, Je reviens de mourir (publié lui aussi aux éditions Sarbacane dans la collection Exprim', que j'ai ainsi découverte) ne laisse pas indifférent. Comment l'être face à cette histoire croisée de deux jeunes femmes, Marion et Eve, l'une prostituée par l'homme dont elle est folle amoureuse, l'autre se droguant au sexe jusqu'à écoeurement pour ne pas tomber dans les "pièges" de l'amour ? D'autant plus que l'écriture, là encore, est dure, brute et brutale, ne faisant aucune concession.
J'ai vu ici et là sur Internet que ce roman faisait grand débat, notamment auprès des libraire et des bibliothécaires, avec une question récurrente : dans quel rayon le classer ? Autrement dit, à quel "public" est-il destiné ? La collection Exprim' vise les 15-25 ans. Sur leur site, Je reviens de mourir est même indiqué "à partir de 14 ans". Mais ce roman peut-il vraiment se lire à cet âge-là ? Pour répondre non, les deux arguments avancés sont le caractère sexuel de certaines scènes, renforcé par un langage cru, d'une part, et d'autre part, la noirceur de l'univers présenté, qui semble indiquer que l'amour n'a aucune issue.
Le premier argument est discutable et je ne le discuterai pas : je sais que, pour ma part, je goûte peu ce langage cru dans les romans de manière générale (qu'ils soient pour ados ou pour adultes), mais je ne me permettrai pas de l'interdire aux ados car, effectivement, il ne faut pas s'arrêter à ça dans un roman.
Le deuxième argument me touche davantage : effectivement, tout est très noir dans ce roman. Alors, certes, on ne vit pas dans le monde des Bisounours, et on ne va pas se sentir obligé de mettre des happy end partout sous prétexte qu'on s'adresse à des adolescents (c'est d'ailleurs ce que je critique dans le livre d'Hubert Ben Kemoun que j'ai lu précédemment). Mais je ne suis pas pour autant certaine de l'effet produit : est-ce un livre qui permet de trouver l'impulsion nécessaire pour donner un sens à sa vie, à ses relations amoureuses, pour éviter à tout prix d'en arriver là où en arrivent Marion et Eve ? Ne risque-t-on pas, au contraire, de dégoûter et de laisser la porte ouverte à des généralisations ? Par exemple, dans ce livre, les personnages masculins sont quand même sacrément écoeurants, et rien ne semble sauver la gente masculine (à part peut-être l'homme au fauteuil, mais qu'on ne rencontre que l'espace de deux pages). A ce titre, j'ai préféré K-Cendres, où le personnage de Marcus laisse flotter tout de même un espoir au-dessus de ce monde de brutes.
Je ne suis donc pas convaincue par ce roman-là ; mais ne vous inquiétez pas, fans d'Antoine Dole, il reste Laisse brûler, et vous allez lire des choses plus positives !