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La petite Mu qui plume
8 août 2016

Semaine de la BD, #1 : Riad Sattouf, L'arabe du futur

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Pour cette semaine de la BD chez la petite Mu, le principe sera le suivant : découvrir des auteurs, des séries ou des genres que la petite Mu est la dernière - ou presque - à découvrir. 

En effet, les deux premiers tomes de l'autobiographie dessinée et racontée par Riad Sattouf ne datent pas d'aujourd'hui : le premier tome, paru en 2014, a remporté le Fauve d'or au festival d'Angoulême de 2015, et le deuxième tome est sorti dans la foulée en juin 2015. Mais il n'est jamais trop tard pour bien faire : à défaut, donc, de vous apprendre qui est cet auteur et de quoi parle cette bande dessinée, je me contenterai de vous livrer mes impressions sur un phénomène déjà connu. 

Je suis plutôt bonne cliente pour les autobiographies en bande dessinée. Qu'elles s'inscrivent dans un cadre historique, comme Persepolis, Couleur de peau : miel, Deuxième génération, ou pas du tout, comme Fraise et chocolatj'aime lire des récits de vie, voir le regard qu'un auteur porte sur lui-même, et, qui plus est en BD, un regard au sens propre : comment cet auteur illustrateur voit-il son propre corps, comment se le représente-t-il dans l'espace et le temps ? Je partais donc assez convaincue d'avance, avec, en outre, l'envie d'en apprendre davantage sur l'histoire du Moyen Orient, vue de l'intérieur. 

Je suis sortie de ma lecture un peu noyée sous le flot d'informations. C'est, parfois, je trouve, l'écueil de ces autobiographies dessinées. Le genre de la BD appelle la vivacité, exige de ramasser des morceaux entiers en une case efficace, tant par le dessin que par le texte. Dans une bonne BD, l'histoire se joue presque autant entre les cases que dans ce qui est dessiné. Or, quand on entre dans un univers qu'on ne connaît pas, ou mal, il est difficile de lire entre les lignes. J'ai eu parfois l'impression de passer à côté de faits qui devaient être évidents à Riad, enfant et adulte. Cependant, là où le pari est gagné, c'est que cette lecture donne envie d'aller chercher des précisions ou des compléments sur les faits historiques ou sociologiques abordés dans cette BD. 

De même, la BD n'étant pas spontanément un genre se prêtant aux développements ou à l'analyse, Saatouf prend le parti, justement, de ne jamais prendre parti. Les comportements de ses parents - le père et son admiration aveugle du "socialisme arabe", la mère et ses quelques coups de colère comme des coups d'épée dans l'eau - sont déstabilisants, et parfois clairement choquants. Mais aucun jugement de valeur n'est proféré par le narrateur. Dans le deuxième tome, le petit Riad qui grandit se laisse aller à exprimer davantage d'émotions : une "incroyable envie de pleurer" quand son père l'emmène chasser les moineaux, une peur bleue de l'école syrienne et de sa terrible maîtresse. Certainement que le choix d'une certaine distance vient d'une volonté de réalisme : il est toujours difficile pour un enfant - à la fin du tome 2, Riad n'a jamais que sept ans - de mettre des mots sur ses sentiments. En cela, la narration est très naturelle, car elle restitue par images des scènes que l'enfant a mémorisées, sans pour autant les avoir analysées. Finalement, il en est de même dans Persepolis, où Marjane Satrapi cherche bien à montrer à quel point il est difficile de poser un regard critique sur des lieux, des gens, des habitudes qui ont rythmé son enfance. 

Peut-être que le tome 3 (à paraître le 6 octobre) introduira peu à peu un regard plus critique ? A moins que ce parti pris de distance soit maintenu tout au long des cinq tomes annoncés ? Je reste en tout cas quelque peu sur ma faim, et j'aurai certainement besoin de relectures pour apprécier davantage cet énorme succès de la bande dessinée. 

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Le royaume de Kensuké

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