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La petite Mu qui plume
enfant
13 février 2013

Le passeur

               

 (Je plume sur une vieillerie, afin de compléter les liens des mes listes de lectures cursives  . Dorénavant ces lectures datées seront signalées par un [Vieillerie] au début du message.)

Ce livre a toujours été une référence pour moi. Le principe en est très simple : l'auteur a créé un univers (qui se situerait à une époque indéterminée, mais après la nôtre) dans lequel sensations et émotions ne font quasiment plus partie de la vie des hommes. Un enfant se fait mal ? On lui donne un comprimé rudement efficace : à peine a-t-il eu le temps de connaître un semblant de douleur qu'elle a déjà disparu. Même le désir sexuel est contrôlé par une autre pilule, non pas contraceptive (le problème ne se pose de toute façon pas : seules certaines femmes de la société peuvent enfanter, les "mères porteuses", considérées comme inférieures par le reste des habitants), mais tueuse de fantasmes. On doit confesser ses rêves en famille au petit déjeuner. On ne doit pas mentir. Enfin (même si la liste est loin d'être finie), on ne peut pas connaître le plaisir d'hésiter entre une pomme rouge et une pomme verte, car les couleurs n'existent plus. Plus exactement, on n'arrive plus à les percevoir.
Dans ce monde, un personnage détient des connaissances que nul autre ne possède : c'est le Passeur. Lors de la cérémonie de ses douze ans, âge auquel le Conseil attribue définitivement une fonction sociale à tout adolescent, Jonas apprend qu'il a été choisi pour être le nouveau Passeur. Rien ne sera plus comme avant pour lui ; ou plutôt, peu à peu, tout redeviendra comme avant - avant que le monde dans lequel il vit n'ait été affadi et rigidifié. 

La qualité de ce genre de roman tient évidemment beaucoup à la cohérence de l'univers créé. Sur ce point, rien à redire : les détails sont magistralement coordonnés. Tout y est réaliste à en faire parfois froid dans le dos. On ressent, avec Jonas, cette impression d'enfermement - dont il ne peut prendre conscience qu'après avoir découvert qu'il a existé autre chose, et qu'il existe peut-être encore autre chose, ailleurs. 

Ecrit dans un style sans difficulté, ce livre est pour moi une très grande oeuvre à partager avec nos élèves, idéale pour enrichir une réflexion sur l'utopie ou la contre-utopie, la frontière entre les deux étant parfois très mince. On peut y lire aussi une réflexion sur le totalitarisme, même si finalement rien n'est centré sur le pouvoir, dont on ne sait pas vraiment, d'ailleurs, qui le détient - hormis les membres du Conseil. C'est enfin une très belle histoire sur le plaisir, le bonheur ; sur la vie, tout simplement. 

A lire et à faire lire ! 

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7 février 2013

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Découverte littérature jeunesse 2012-2013

Lors de mon dernier passage à Saint-Etienne, découverte d'une petite librairie sympathique, Lune et l'autre, qui a le mérite de proposer des genres très variés (romans, essais, littérature jeunesse, beaux livres...) malgré le peu d'espace, et de mettre en valeur de nombreux ouvrages, ce qui donne très envie de se laisser tenter. 

Et, donc, au rayon ados, je tombe sur ce petit ouvrage à la couverture... gaie, si je puis me permettre ce jeu de mots. Je me le permets car je trouve cette couverture à la fois ingénieuse ("maline", comme y diraient dans Top Chef) et joyeuse, lumineuse. 

Pourtant, l'histoire qui y est brièvement racontée (le livre ne fait que 56 pages, très aérées ; on est plutôt du côté d'une longue nouvelle que d'un roman) ne l'est pas tellement, lumineuse : le jeune héros, qui écrit à la première personne, se fait régulièrement frapper et traiter de "fiotte" ou de "pédé" par les garçons du collège. Mais le pire pour lui n'est pas cela ; le pire, c'est de voir que son père, au lieu de l'aider et de faire cesser ces agissements, semble cautionner implicitement, en incitant son fils à se défendre s'il veut montrer qu'il est un homme, un vrai. 
Il s'agit donc surtout d'une histoire sur la relation entre père et fils, davantage peut-être qu'une réflexion sur l'homosexualité. Le style est simple, mais épouse bien les sentiments du personnage. Et c'est la fin qui apporte la lumière qui manquait aux pages précédentes, et qui, a posteriori, éclaire l'ouvrage tout entier. 

Une jolie histoire que je mettrais volontiers dans les mains de mes élèves, qui pose beaucoup de questions, mais qui ouvre aussi de nombreuses pistes. 

 

30 décembre 2012

L'enfant volé

Bon. Pour la première fois, j'ai dû définitivement abandonner un livre de McEwan. Pas dès les premières pages comme cela avait pu me le faire aux débuts de ma rencontre avec cet auteur, non ; j'ai tenu bon pendant une grosse moitié du livre, mais, vraiment, je n'ai pas pu, ça m'est tombé des mains. On sent que le style se cherche encore, et les trop nombreuses digressions sont nettement moins maîtrisées que dans les ouvrages suivants. On se perd sans arriver à se retrouver, ce qui est dommage car cet histoire d'un père cherchant désespérément son enfant disparue aurait pu être bouleversante. Une déception qui n'en est pas une, car je sentais bien que je ne serais pas convaincue par les oeuvres les plus anciennes. 

10 juillet 2012

La nouvelle robe de Bill et Le jour où je me suis déguisé en fille

           

    Deux romans sur une même idée : et si on mettait une robe à un garçon ? La différence - et elle est tout de même de taille -, c'est que, dans le roman d'Anne Fine, Bill subit tout au long du roman cette horrible journée pendant laquelle tout le monde l'a pris pour une fille, alors que, dans le récit de Walliams, le déguisement est choisi, désiré, même, depuis longtemps. 

    Il y a aussi certainement une différence d'époque, de contexte. La "jolie robe rose avec des boutons compliqués en nacre", qu'il ne faut surtout pas tacher, de Bill, n'a pas grand-chose à voir avec "la robe aux mille et une petites paillettes rondes" de Dennis, le héros de David Walliams. Vingt ans se sont écoulés entre les deux romans, on le sent dans la peinture des relations fille-garçon. Anne Fine nous les montre bien comme deux clans séparés, et insiste sur les choses réservées aux garçons (allez, au hasard : le foot) et les choses réservées aux filles. Même si une certaine mixité s'instaure déjà, par exemple dans la lecture des illustrés : Barbie n'a plus la cote chez les filles, elles lui préfèrent Mickey Parade ou Spirou. Chez Walliams, la frontière fille-garçon est un peu moins nette ; l'amitié entre le héros et Lisa, la plus belle fille de l'école, semble d'ailleurs presque naturelle. 

    Dans les deux cas, l'auteur s'est bien amusé - et le lecteur avec. Le ton adopté par Anne Fine a plus d'ironie, plus de mordant, mais le roman de Walliams est plus fantaisiste, avec des personnages décalés et irréalistes - comme le directeur de l'école - dans un univers à la Dahl, sans l'aspect merveilleux. (Ou peut-être ai-je été influencée par la présence des dessins de Quentin Blake, célèbre illustrateur de Dahl ?) 

     Enfin, si Walliams nous livre un happy end typique des récits pour enfants :
      "Dennis sourit.
       Le monde avait changé." ,
Fine, elle, ne conclut pas autrement que par le soulagement très marqué de Bill à qui sa mère a dit que c'était "la dernière fois qu'[il] allai[t] à l'école en robe !". Là où Walliams prône la tolérance, le droit à la différence, Fine éveille seulement les esprits aux difficultés inhérentes à la condition de fille dans les années 90. 

    PS : A noter, Anne Fine est également l'auteur de Quand papa était femme de ménage, qui a inspiré un célèbre film avec Robin Williams... Je vous laisse le soin de trouver le titre de ce film ! Le premier qui répond a droit à... mon respect ^^ (pas de lot cette fois-ci, c'est trop facile !)

 

     

9 juillet 2012

Je ne suis pas comme toi

Alors, ce qu'il faut d'abord savoir, c'est que je me suis mise en quête d'une autre série d'ouvrages : de la littérature jeunesse tournant autour de la question du genre (masculin/féminin). La raison pour laquelle je m'y intéresse plus particulièrement en ce moment, c'est que, comme je l'ai appris dernièrement, j'emmènerai l'an prochain mes 5e au cinéma, et que Tomboy sera au programme. Je vous renvoie au synopsis ici .

Il y est donc question d'une fille se faisant passer pour un garçon. Or, j'étais persuadée d'avoir lu un livre, étant petite, sur le même scénario. Mais je ne trouvais nulle part une quelconque allusion au fait que Tomboy serait inspirée d'un livre. J'ai élargi mes recherches Internet à la littérature jeunesse transgenre en général, espérant retrouver ce livre disparu. C'est en parcourant ce site extrêmement intéressant, et sa rubrique "Livres pour les jeunes", que j'ai compris mon erreur : je pense avoir fait un amalgame entre le synopsis de Tomboy et l'histoire racontée dans La nouvelle robe de Bill, d'Anne Fine (qui raconte en fait le processus inverse, un garçon passant pour une fille). C'est étrange, mais je ne vois pas d'autre explication, puisque, de toute évidence, il n'existe pas de livre racontant l'histoire de Tomboy. Bref.

C'est donc sur le site Altersexualité que je suis tombée sur une mine de titres potentiellement intéressants pour prolonger la réflexion de mes élèves après visionnage du film. Je m'en suis procuré une bonne quantité, et en avant la lecture !

Premier titre : Je ne suis pas comme toi. Je suis restée sur ma faim. Ce très court roman repose beaucoup sur l'implicite. Alors, certes, il propose de nombreuses pistes pour la réflexion. Mais est-ce vraiment ce qu'on attend d'un livre ? Je me rends compte que, ce que j'aime, c'est quand on me raconte une histoire. Or, là, l'histoire, elle se passe avant et après, mais pas pendant le livre. J'en suis donc ressortie un peu frustrée. Et pas certaine du tout que les jeunes lecteurs (la collection Neuf de L'Ecole des Loisirs s'adresse en général à des lecteurs de fin de primaire) sachent tirer tout seuls les ficelles de ce qui est écrit entre les lignes. 

Pour comparaison, la critique de Lionel Labosse sur son site

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30 janvier 2012

Mon petit coeur imbécile

Un nouveau livre-que-c'est-un-élève-qui-me-l'a-conseillé (et même prêté, dans ce cas-ci). C'est tout de même la troisième fois que ça m'arrive cette année : d'abord, Tobie Lolness, ensuite, Les Chroniques de Spiderwick (que j'ai trouvé plutôt sans intérêt... au point que je n'ai pas pris la peine d'en rédiger une critique, honte à moi), et ce dernier, prêté vendredi par un garçon de 6e. Mes élèves sont exceptionnels (ou comment m'auto-encourager à aller en cours dans quelques heures...). 

 Je connaissais l'auteur de nom, mais sans avoir rien lu de lui : cette première rencontre avec son écriture est une réussite. J'ai beaucoup aimé le dépaysement (l'histoire se passe en Afrique) auquel je ne m'attendais pas du tout. C'est peut-être bête, mais, si les histoires d'enfants atteints d'une grave maladie sont assez nombreux, on n'a pas l'habitude que le récit se passe au pays des antilopes. Le texte en est tout de suite marqué par une coloration particulière, qui m'a portée au fil des pages. 

C'est une très jolie histoire, avec un style simple et juste. Moi qui lis surtout des romans pour ados, je ne me suis absolument pas ennuyée dans ce livre destiné à un public plus jeune. Et je remercie vivement mon élève de me l'avoir fait découvrir !

 

27 décembre 2011

Le rêveur

Pour une fois, en guise de morceau choisi, voici un extrait de l'interview de Ian McEwan, en fin d'ouvrage (ces pages que j'aimais tellement lire à la fin des Folio ou des Lecture Junior quand j'étais petite, moi qui me targuais de devenir écrivain...). Plus précisément, sa réponse à la question : "Quel conseil donneriez-vous à un écrivain débutant ?"

"Je conseillerais à un écrivain en herbe de tenir un carnet et d'y noter chaque jour quelque chose. Deux sortes de choses : ce qui lui est arrivé dans la réalité, et aussi ce qui s'est passé dans ses rêveries, dans son monde imaginaire."

Associez ces deux mondes, celui du rêve et celui de la réalité, et vous obtiendrez les sept histoires qui composent ce premier et unique (pour l'instant) récit jeunesse de l'un de mes auteurs fétiches du moment. Peter Fortune est un garçon très imaginatif à qui son esprit rêveur en fait voir de toutes les couleurs : Peter se retrouve tour à tour attaqué par la Vilaine Poupée et sa cohorte de consoeurs, transporté dans la peau d'un vieux chat en mal de réputation ou d'un bébé Cadum, contraint d'élaborer des stratégies pour capturer un mystérieux cambrioleur... 

Cette lecture est en fait une relecture. Et, comme par magie, certaines phrases, certains passages entiers se reformaient dans ma tête avant même que mes yeux se posent dessus : ces histoires sont en fait restées bien gravées dans ma mémoire, jusque dans les détails. Preuve du pouvoir captivant de ce petit livre sans prétention autre que de faire voyager un court moment (une centaine de pages) des jeunes lecteurs en quête de fantaisie et d'étrangeté. 

A la fin du livre, Gallimard Jeunesse propose deux autres titres en Folio Junior : Le chat qui parlait malgré lui, de Claude Roy (lu quand j'étais petite mais dont je ne garde qu'un souvenir très, très flou), et J'étais un rat ! de Philip Pullman, que j'aimerais découvrir. Deux futures (re)lectures, donc, qui pourront, en outre, m'être utiles dans le cadre d'un cours sur les métamorphoses... (foutue déformation professionnelle qui fait passer la prof avant la lectrice parfois...)

 

27 décembre 2011

La maison qui s'envole

"Il y a des maisons qui ont toujours l'air de vouloir s'envoler. On les a posées là, un peu de travers, au coin de la route, avec leurs fenêtres et leurs portes, et leur petite cheminée qui souffle de toutes ses forces une fumée de toutes les couleurs, grise, bleue, blanche."

Un petit livre plein de merveilles qui se croque en une bouchée. Je ne connaissais de Claude Roy que ses poèmes : sa plume est tout aussi bariolée dans ce récit. Beaucoup de fantaisie, quelques pointes d'humour, et voici une maison qui décolle et nous emmène en voyage avec elle. Les dessins de Georges Lemoine sont également très réussis, tout en simplicité.

En tant qu'enseignante de français, j'ai aussi trouvé ce récit extrêmement pédagogique, avec une foule d'extraits exploitables en classe, surtout en 6e : hop, une page pour illustrer un cours sur les épithètes, hop, une autre sur les récits enchâssés, youp là, quelques passages à donner en dictée par-ci par-là... 

J'ai découvert là un grand livre dont je ne soupçonnais même pas l'existence ! 

 

25 octobre 2011

Tobie Lolness : La vie suspendue et Les yeux d'Elisha

        

Et voilà, comme je suis très obéissante, sitôt entendu ce conseil d'une élève de 4e ("Madame, vous connaissez Tobie Lolness ? C'est trop bien !"), je me suis achetée le premier tome. Et sitôt terminé ce tome 1, je me suis achetée le tome 2. Et sitôt terminé ce tome 2... ah non, zut, c'est fini, pas de tome 3.

L'objectif a été parfaitement atteint avec ce roman en diptyque (d'ailleurs, ce n'est qu'en copiant-collant les deux couvertures côte à côte que je me suis rendue compte de la symétrie entre les deux... les deux personnages qui accourrent l'un vers l'autre... les saisons les séparent mais ils se retrouveront quand même... que c'est beau !!) : plonger le lecteur dans un univers qu'il n'a pas envie de quitter si vite. 
Comme toute "saga" (je ne sais pas si l'on peut parler de saga quand il n'y a que deux volumes), il y a beaucoup de personnages, avec des noms qui se ressemblent (Maï, Maïa, Ilaïa...), j'ai parfois été tentée de prendre une feuille et un stylo et de refaire l'arbre généalogique pour m'y retrouver... Peut-être d'ailleurs une volonté de l'auteur, un clin d'oeil à ce personnage principal, si l'on peut dire : l'arbre, le grand chêne, l'équivalent, pour ces êtres minuscules, de notre planète Terre. Enfin, si les ados arrivent à s'y retrouver, il n'y a pas de raison que je m'y perde, hein ? Alors on s'accroche un peu et on continue. 
C'est beau, c'est plein de rebondissements, il y a des secrets à découvrir, des personnages à deux visages... Ca fait pleurer à la fin, mais sourire en même temps. C'est aussi rempli de belles trouvailles stylistiques, des images plutôt bien vues. Quelques traits d'humour aussi. Une vraie bonne lecture, que j'aurais bien continuée si j'avais pu.
Et, pour finir, cette question qui me turlupine, et pour laquelle j'en appelle à des avis extérieurs : référence à Aragon ou  non ? Le deuxième tome s'appelle Les yeux d'Elisha, et j'ai croisé, à un moment, l'expression "il était fou d'Elisha"... Peut-être pas suffisant, comme preuves, mais quand même. Qu'en dites-vous ?

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Le royaume de Kensuké

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