Swing à Berlin
Découverte littérature jeunesse 2012
Ah, là, c'est autre chose ! (voir le message précédent)
Quelle belle découverte que ce roman inattendu ! Le style, en lui-même, n'a rien d'exceptionnel, mais sa grande fluidité et l'équilibre respecté entre des passages de récit, des dialogues et des descriptions laisse le champ libre à l'histoire, originale, que Christophe Lambert a choisi de nous raconter.
Figurez-vous (je l'ignorais, pour ma part) qu'en 1942, Goebbels, pour remotiver les troupes, au sens propre comme figuré, a demandé la création d'orchestres de "jazz aryen". Pourquoi du jazz ? Parce que c'est une musique entraînante, dansante, et que les Allemands du XXe siècle ont envie d'écouter autre chose que les valses de leurs grands-parents. Oui, mais le jazz, c'est de la musique de nègres, de tziganes, bref, de dégénérés. Donc, Goebbels souhaite montrer à tous que de grands Allemands beaux et blonds peuvent, eux aussi, jouer du bon jazz.
A partir de ce fait réel, Lambert invente l'histoire d'un vieux musicien à la retraite, à qui Goebbels demande de recruter un orchestre - en fait d'orchestre, il s'agira d'un quatuor, car notre musicien est exigeant et ne veut pas sacrifier la musique à n'importe quel caprice du Ministre.
Au final, ce récit, très agréable à lire, raconte la vie de ces individus, qui n'ont que peu de rapport les uns avec les autres, mais sont contraints d'apprendre à vivre - et à jouer - ensemble, tout en plongeant le lecteur dans cette période très particulière pour les Allemands. Bien sûr, on y parle de la guerre, du nazisme, et de la résistance. Sur cette dernière idée, le final des musiciens, qui est aussi celui du roman, est très bien trouvé, et très émouvant.
Ce roman pourrait être proposé en diptyque avec Le combat d'hiver de Mourlevat : les thèmes y sont proches, et l'on peut souligner à quel point la société futuriste imaginée par Mourlevat rencontre des échos dans cette période historique bien réelle de la Seconde Guerre Mondiale.