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La petite Mu qui plume
30 juin 2016

Petites lectures pour petits lecteurs, épisode 3 : la collection "Boomerang"

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J'ai découvert cette collection en septembre, lors du lancement du prix Pep 42 avec nos classes de sixième. 

Le premier livre que j'en ai lu faisait donc partie de la sélection du prix, et c'était Chat par-ci, Chat par-là, de Stéphane Servant. Il n'a pas gagné le prix, mais, dans ma classe, il a remporté pas mal de succès. Evidemment, la première question qu'on se pose, c'est : "On commence par oùùùùù ?". Eh bien, justement, c'est ça qui est très chouette : on commence par où on veut ! La collection est fondée sur le principe de deux histoires qui se répondent (une même intrigue, avec deux points de vue différents). Le côté qu'on choisira va nécessairement déterminer la façon dont on entre dans l'histoire, le regard qu'on portera sur les personnages, mais c'est ça qui est intéressant. Dans Chat par-ci, Chat par-là, vous choisissez Lorette, une vieille dame qui râle beaucoup, ou Sofiane, un adolescent plutôt joyeux. Les deux sont coincés chez eux avec une jambe dans le plâtre. Voyez vous-mêmes comment ces deux récits débutent : 

"J'attends Lunes.
C'est un drôle de nom pour un chat. 
Mais j'adore les lundis et les chats. Et l'espagnol aussi. Lunes, ça veut dire lundi.
Le lundi est le jour où l'infirmière vient me faire faire les exercices de gymnastique.
Elle est jeune, belle et elle rit tout le temps. Elle a un accent espagnol qui chante. Et j'aime bien ça."

"J'attends Lundi.
C'est un drôle de nom pour un chat. 
Mais je n'aime ni les lundis ni les chats. C'est pour cela que j'ai choisi de l'appeler Lundi. Le lundi est le jour où l'infirmière vient me faire faire les exercices de gymnastique.
Et je n'aime ni la gymnastique, ni l'infirmière. Elle est jeune, belle et elle rit tout le temps. Qu'est-ce qu'il y a de si drôle ? Avec son accent de chanteuse de flamenco, elle est insupportable !"

Derrière une histoire qui semble légère se cache un message sur la différence, la solidarité, la tolérance, et une "fin" (si l'on peut parler de fin) pas si attendue que ça. Stéphane Servant, il écrit des choses bien, quand même, j'ai découvert ça depuis quelques temps ; j'en ai déjà parlé ici et j'en reparlerai bientôt. 

Puis j'ai découvert qu'Antoine Dole avait co-écrit un titre de cette collection. Cette fois-ci, ça s'appelle Salut, Hikaru ! Konnichiwa, Martin ! Et, comme le suggèrent les titres, il est question de voyage et de langues. Une histoire toute simple, là encore, de deux écoliers, l'un français, l'autre japonaise, qui s'envoient des lettres. Mais une histoire pas si naïve que ça, qui, elle aussi, reflète bien les préjugés qu'on peut avoir sur certaines personnes ou certaines pratiques. 

Tous les autres titres sont dans le catalogue, et certains me paraissent alléchants dès le titre (notamment J'aime pas ma petite soeur/Je veux être la grande !). 

D'autres idées de lecture utilisant l'idée des différents points de vue : 

- un album : l'indémodable Une histoire à quatre voix, d'Anthony Browne

- un roman jeunesse : le non moins indémodable L'enfant océan, de Jean-Claude Mourlevat. (plumé ici chez la petite Mu, mais aussi sur le site Educalire, un peu plus fourni, et plus pédagogique.)

- enfin, deux romans jeunesse qui ne racontent qu'une seule histoire : Le pianiste sans visage et La fille de 3eB, de Christian Grenier (et là, allez voir directement sur le site de l'auteur, avec un long commentaire sur l'écriture des deux romans - attention aux spoilers, cependant).

 

 Néo-défi lecture 2016 : Un livre avec deux auteurs (pour Salut, Hikaru ! Konnichiwa, Martin !)

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27 juin 2016

Petits livres pour petits lecteurs, épisode 2 : la collection "Premier roman"

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J'ai découvert cette collection un peu par hasard, dans une librairie. J'ai reconnu Antoine Dole, que j'ai acheté, et j'ai aussi remarqué les deux autres titres ci-dessus : Chère Théo, parce que je pensais y découvrir un questionnement sur le genre, à l'époque où j'étais en quête de ce thème-là dans les récits jeunesse (voir mes archives en juillet 2012), et Construire un feu, parce que c'est une nouvelle de London que je venais de découvrir, qui m'avait plu, et je m'étonnais de la découvrir dans cette collection. Finalement, mes deux attentes ont été déçues : après lecture du résumé et des premières pages (qu'on peut feuilleter ici), Chère Théo ne parle pas vraiment de genre, et Construire un feu reste à ce jour le seul titre "classique" de la collection. Si on en feuillette le catalogue, on découvre surtout des récits de jeunes enfants en apprentissage, ou des textes proches de l'univers des contes et légendes. Si j'aime beaucoup les couvertures, je suis donc un peu déçue par la relative monotonie des thèmes proposés par la collection. 

Pour dire un mot sur Le baiser du mammouth : je l'ai lu avec étonnement, car je n'attendais pas Antoine Dole dans ce registre du récit pour jeunes lecteurs, humoristique, bien plus léger que les romans pour ados que j'avais lus jusque là (K-Cendres pour n'en citer qu'un). Pas non plus de la même veine qu'A copier cent fois, même si on s'en rapproche pour ce qui est du lectorat visé. Le baiser du mammouth, c'est l'histoire d'un jeune garçon de neuf ans, Arthur, amoureux d'une fille beaucoup plus âgée que lui : quinze ans ! Différence d'âge tout à fait négligeable à l'âge adulte mais, évidemment, pas du tout dans l'enfance. Le roman raconte les stratégies totalement fantaisistes d'Arthur pour conquérir la belle Fiona, notamment l'idée de la congeler jusqu'à ce qu'il la rejoigne en âge... Il y a une suite (que je n'ai pas encore lue), Mon coeur caméléon, dans laquelle Arthur se trouve cette fois-ci amoureux de deux jumelles, qui à elles deux forment la fille parfaite à ses yeux. Le sujet du premier tome me semble un peu plus original que le second. L'écriture est tout à fait agréable. Je pense qu'elle peut plaire aux jeunes lecteurs. Cependant, je reste quand même attachée aux livres "pour les plus grands" de cet auteur...

Signalons qu'en fait, Antoine Dole aime écrire pour les plus jeunes, et même de plus en plus. La file d'attente à son stand lors de la dernière Fête du livre jeunesse de Villeurbanne avait une moyenne d'âge peu élevée. Beaucoup venaient se faire dédicacer les bandes dessinées Mortelle Adèle, elles aussi ciblées pour de jeunes lecteurs. Et maintenant, l'auteur a pris goût à ce public, et même aux tout premiers lecteurs : il l'explique sur son site à propos des petits livres publiés chez Bayard Jeunesse pour accompagner l'apprentissage de la lecture, ou encore de son tout premier album pour enfants, Le monstre du placard existe (et je peux le prouver!), à paraître en septembre 2016. 

"Premier roman", une collection qui a donc le mérite de publier Antoine Dole aux côtés de Jack London ! 

26 juin 2016

Grand Palais : Carambolages

Afficher l'image d'origine

Vite, plus que quelques jours pour découvrir cette exposition pas comme les autres ! 

En ne voyant que l'affiche, vous ne pouvez pas réellement deviner ce qui vous attend. Le titre, le tableau choisi, on penserait à une exposition sur l'art flamand, quelque chose dans le genre. En fait, ce tableau (qui n'est pas un Brueghel, mais bien une oeuvre anonyme) n'est que l'une des 185 oeuvres exposées, sculptures, photographies, peintures, et j'en passe, de l'Antiquité jusqu'à notre époque contemporaine. Attention, je dis "de...jusqu'à", mais l'un des principes de l'exposition est de ne pas présenter ces oeuvres dans un ordre chronologique. Les "carambolages", en effet, sont des entrechocs, des ricochets (le terme vient du billard), entre des oeuvres qui partagent des points communs mais ne se suivent pas nécessairement dans l'histoire de l'art. 

Il s'agit donc (en tout cas, c'est l'intention des organisateurs) d'un moment d'interaction entre le visiteur et les oeuvres. Chacun doit trouver par soi-même le lien qui unit les oeuvres, présentées les unes à côté des autres, mais sans qu'aucune indication ne soit donnée. On peut penser aux formes, à la lumière, à la composition de l'oeuvre, parfois à un détail... Des vidéos ont été publiées, avec des interviews de visiteurs. 

De mon côté, j'ai visité l'exposition virtuellement grâce au livre (voir plus loin). Je dois reconnaître que c'est assez déconcertant. Ce n'est pas tant le fait qu'il n'y ait pas de chronologie qui m'a gênée, ni que l'interprétation des oeuvres nous soit laissée. Mais j'ai eu une impression d'intense foisonnement, avec des oeuvres dont je ne possédais absolument pas les codes, que ce soit l'art antique non européen ou des installations contemporaines plus ou moins conceptuelles. Je n'ai pas beaucoup pu me raccrocher à des artistes ou des styles que je connaissais. Du coup, à la fin, je n'ai pas l'impression d'avoir "appris" quelque chose. Mais c'est, je pense, tout l'enjeu du projet : insister sur le fait qu'on n'a pas forcément à apprendre quelque chose de l'art, mais que le plus important est le choc esthétique (une expression qui revient souvent dans les diverses présentations de l'exposition), la rencontre très personnelle entre l'oeuvre et l'observateur. 

Certes, il ne reste plus beaucoup de temps pour voir physiquement l'exposition, mais si vous n'en avez pas l'occasion, vous pouvez en profiter de différentes manières : 

- le site internet, qui propose notamment des jeux : pas tellement palpitants, mais qui ont le mérite de faire découvrir certaines des oeuvres exposées. (En faible qualité, cependant, à cause de la petite taille des images.)

- le livre, surtout, très bel objet qui peut certainement remplacer la visite en elle-même. Il se compose d'une reproduction des 185 oeuvres sous forme de livre-accordéon : 

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Ce dépliant est accompagné par deux livrets : l'un présentant une brève notice pour chaque oeuvre (mais attention, sans jamais les relier entre elles, pour respecter le principe de l'exposition), l'autre, intitulé "Essais", présentant plusieurs réflexions par des spécialistes de l'histoire des arts. Prévoyez de la place dans votre bibliothèque, le livre est énorme ! 

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Sinon, pour les Parisiens qui n'ont rien de prévu cette semaine, voici les informations pratiques : 

Exposition Carambolages
Grand Palais (3, avenue du Général Eisenhower, 75008 Paris)
Du 2 mars au 4 juillet 2016
Plein tarif : 13€ (différents tarifs avec visites ou animations)
Tous les jours sauf le mardi, avec nocturne le mercredi. 

23 juin 2016

Petites lectures pour petits lecteurs, épisode 1 : la collection "Il était une (mini) fois"

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J'inaugure aujourd'hui une petite série, sur de petits livres adressés aux petits lecteurs. 

Commençons avec les éditions Didier jeunesse, et leur collection appelée "Il était une (mini) fois". Le principe est de proposer aux petits lecteurs des réécritures courtes, par des auteurs contemporains, de célèbres histoires. Une première chose que j'ai aimée, c'est que, dans ces histoires, il n'y a pas que des contes. Les deux dernières parutions de la collection, par exemple, s'intéressent pour l'une au théâtre, avec l'histoire de Roméo et Juliette, pour l'autre à un roman de Georges Perec. 

Intéressons-nous d'abord à ce dernier : Le livre envolé de Piotr-Olivius Pilgrim, par Séverine Vidal. Une mention à l'intérieur précise : "très librement adapté du Voyage d'hiver de Georges Perec". Le choix de réécrire ce roman-là s'avère judicieux et malicieux, puisque c'est une histoire de réécriture, qui commence en fait comme une histoire de plagiat. Dans les deux cas, un personnage découvre un livre dans lequel il ne cesse de reconnaître des phrases, des extraits mêmes d'oeuvres très connues. Pourtant, ce livre mystérieux a été publié bien avant toutes les oeuvres qu'il semble plagier... Comment est-ce possible ? N'ayant pas lu le roman de Perec, je ne sais pas quelle réponse il apporte à la question, mais celle du mini-roman de Séverine Vidal est à la fois d'une logique implacable et d'une fantaisie savoureuse. J'ai beaucoup aimé cette petite histoire qui parle de littérature. Elle m'a donné envie de lire "l'original". 

Qu'en est-il du Roméo et Juliette de Valérie de La Rochefoucauld ? Précisons tout d'abord que le texte n'est pas théâtral : l'histoire est romancée, ce qui lui donne beaucoup de chair, indispensable aux plus jeunes qui ont besoin d'une atmosphère pour goûter pleinement cette histoire éternelle (mais qu'ils ne connaissent peut-être pas encore). Les phrases sont courtes, rédigées au présent de narration, et font la part belle à l'oralité : jeux sur les sons, répétitions, énumérations... Le vocabulaire est précis, les comparaisons et métaphores mises à contribution pour donner de la poésie au texte. 

Si vous en voulez encore, à vous de découvrir les autres titres de la collection : grands classiques (Peter Pan, La petite sirène, Le petit Poucet), contes d'ici et d'ailleurs... Avec, pour certains titres, des fiches pédagogiques à destination des enseignants (plutôt pour le cycle 2). 

Suite de ma collaboration avec les éditions Didier Jeunesse

20 juin 2016

La découverte de la semaine : les livres en box

Colis Exploratology

En fait, j'ai fait cette découverte il y a un peu plus d'un mois. "On" me demandait des idées de cadeaux d'anniversaire, et j'avais envie de quelque chose de différent. Je pensais au début à un abonnement à la Thé Box, qui me faisait envie, à l'époque où je me promenais en bavant dans ce superbe site, Griottes : palette culinaire. Et, un peu par hasard, j'ai découvert qu'il existait aussi des box de livres !! En fait, il existe des box pour à peu près tout. Donc, les livres faisant partie du tout, ils ont aussi leurs box. 

De tous les concepts que j'ai trouvés à droite à gauche sur la Toile, j'ai aimé celui d'Exploratology

1) pour sa démarche : il s'agit d'un partage tout à fait personnel entre Marjorie, fondatrice du projet, et les destinataires des box. Elle choisit les livres envoyés, les produits ajoutés, réalise les paquets, ajoute un petit mot pour expliquer ses choix. 

2) pour sa simplicité : pas de thème à choisir, de cases à cocher ; une fois qu'on est abonné, on attend le colis surprise, et c'est tout ! 

3) pour le concept de surprise, justement : les livres sont très différents les uns des autres (en tout cas, je juge sur les deux que j'ai reçus pour l'instant), ce ne sont pas des nouveautés, pas des titres "attendus", et pas du tout des livres vers lesquels je me serais tournée (principalement parce que je n'en connais pas les auteurs). 

Avec le livre, des cartes, de petits bonbons, des sachets de thé, de marques différentes à chaque fois. Je ne saurais pas dire encore si ça va me faire devenir une cliente régulière de ces marques. J'ai bien aimé, ce mois-ci, recevoir un petit carnet, assorti à la couverture du livre d'ailleurs.  

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Bref, la box de livres, ça avait tout pour me plaire. Mon abonnement se termine dans un mois, déjà ; peut-être en testerai-je un autre (mais les autres concepts que j'ai pu sur la Toile m'ont fait moins envie). Sinon, il y a les swaps de chez Neoprofs, qui jouent aussi le rôle de "book box" ! Un aperçu d'un colis "Kit de survie pour vacances d'été" que j'avais envoyé à une autre Neo : 

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 Et il y a aussi les box spéciales de la Petite Mu ! Arty en avait gagné une : 

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Mais le problème, c'est que la petite Mu ne peut pas se les offrir à elle-même. Ben non.

En tout cas, merci aux généreux responsables de cet abonnement original ! 

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19 juin 2016

François-Henri Désérable : Evariste

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Evariste. Evariste Galois. Oui, ça me parle. Mais pourquoi ? C'est le nom d'un collège de mon académie. Bon, alors, ça doit être le nom de quelqu'un de connu, alors. Ah oui, c'est ce qu'on me dit, non pas dans l'oreillette, mais en quatrième de couverture : "A quinze ans, Evariste Galois découvre les mathématiques ; à dix-huit, il les révolutionne ; à vingt, il meurt en duel." Mieux que Rimbaud, dites donc ! Ah, je lis que je ne suis pas la première à avoir fait la comparaison : «Une magnifique biographie romancée du "Rimbaud des mathématiques", Évariste Galois. C’est superbe.», écrit Jean-Christophe Buisson dans Le Figaro Magazine à propos de ce premier roman de François-Henri Désérable. Re-ah, en fait, l'auteur a carrément mis en exergue une citation de Pierre Michon extraite de Rimbaud le fils.

Bon, alors, puisque tout a été dit, que diable suis-je allée faire dans cette lecture ? Eh bien, pour mon défi-lecture 2016, il n'a pas été si facile de trouver un auteur "né la même année que moi". Voilà, vous savez tout, j'ai le même âge que Monsieur Désérable. (Et ce n'est plus vingt-sept ans, hélas, comme l'indique encore la quatrième de couverture de l'édition originale.) Et puis, à parcourir Internet, il semblerait que, tant pour ce premier roman que pour son précédent recueil Tu montreras ma tête au peuple, l'auteur ait eu du succès, en tout cas auprès de la critique. Je suis donc alléchée. J'attaque donc ma lecture. 

Et là... 

Wahou ! Outch ! Vindidiousc ! 

Ce sont les mots qui me viennent à l'esprit en posant ce livre. Ils ne sont pas assez forts pour vous dire à quel point cette découverte (d'un livre, d'un auteur) a été formidable pour moi. Ce livre est un concentré de causticité, de mordant, d'ironie, de franche rigolade aussi parfois : qui aurait cru pouvoir dire cela à propos de la biographie d'un mathématicien ? C'est qu'Evariste, du mordant, il en avait. Il lui en fallait, en réalité, pour garder la tête haute face aux divers affronts que la vie a mis sur son chemin : son oeuvre mathématique est incomprise de son vivant, son génie est nié, de nombreuses occasions de s'illustrer (scientifiquement, historiquement) lui sont refusées, la justice manque de justesse avec lui. Même si c'est bien sûr l'auteur qui prend en charge la plupart des remarques pleines d'humour et de fiel qui parsèment les pages de ce récit, des citations du mathématicien ne laissent aucun doute sur sa plume vive et percutante. François-Henri Désérable semble avoir trouvé un personnage à la hauteur de son ambition stylistique, quelqu'un en qui il se reconnaît certainement : on sent transpirer son admiration, même légèrement distante, de part et d'autre de cette biographie. 

Par ailleurs, Désérable est un auteur de l'Histoire. Déjà dans le recueil Tu montreras ma tête au peuple, en racontant les dernières minutes de célèbres guillotinés, le jeune écrivain (oui, j'insiste sur "jeune"...) montrait son envie d'entrelacer Histoire et récit. Je n'ai pas lu ce recueil, mais, dans Evariste, on devrait même dire "entortiller" : cette biographie d'un homme qui n'a vécu que vingt ans est constellée de micro-portraits, de grands hommes (Nerval, Dumas) comme de plus petits, c'est-à-dire tous ces hommes qui se sont tenus sur le passage d'Evariste Galois et qui parfois, sans le vouloir (et même, en ne le voulant pas), l'ont fait accéder à l'Histoire. Je suis loin d'être une spécialiste de l'histoire de la Révolution, mais j'ai beaucoup aimé la redécouvrir à travers les ratés, les à-côtés, les scènes manquées d'un jeune homme qui a dû rédiger une partie de son oeuvre scientifique en prison, parce qu'il avait porté illégalement un costume militaire. 

Désérable est passionné d'Histoire, ça se voit ; moins de mathématiques, parce qu'il avoue franchement qu'il n'y connaît rien et qu'il ne comprend pas un traître mot des théories géniales de Galois. Cette biographie n'est donc pas un ouvrage scientifique ; il serait inexact de dire qu'elle est un ouvrage historique ; c'est surtout une formidable (j'insiste, encore plus que sur "jeune") oeuvre littéraire, un tourbillon, parfois exigeant (Désérable a la phrase longue, il aime passer du registre soutenu à la plus plate vulgarité, le mot "digression" semble avoir été inventé pour lui... et caetera), mais qui arrache plus d'une fois un sourire, voire un rire. 

M'est avis qu'il s'agit là d'un auteur à suivre, et qu'il a certainement été bien inspiré d'écrire un livre sur un jeune génie ! 

 

 Néo-défi lecture 2016 : Un livre écrit par un auteur né la même année que moi 

16 juin 2016

Sandrine Beau : La porte de la salle de bains

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Je vous avais parlé de Hors de moi, de Florence Hinckel, un récit sur la grossesse adolescente que j'avais beaucoup aimé, par la simplicité et la sincérité de son approche. Le roman de Sandrine Beau est publié dans la même collection, Ego, des éditions Talents hauts. On y trouve aussi Mauv@ise connexion, un roman sur le cyber-harcèlement que je n'ai pas lu mais dont j'ai entendu parler, et bien d'autres récits sur des thèmes-clé de la vie adolescente. A cet éditeur, on doit aussi Le zizi des mots et des livres de toutes sortes sur les préjugés, les stéréotypes, les différences. 

La porte de la salle de bains, c'est un roman tout simple (de lecture plus facile que Florence Hinckel, avec un personnage plus jeune, aussi), sur un sujet qui ne l'est pas. Ce sujet, au début, on pense que c'est "tout simplement" la puberté et les transformations qu'elle apporte aux corps des jeunes personnes. En effet, c'est le point de départ de l'histoire : Mia commence à avoir des seins. Bon. Le premier tiers du livre s'attache à donner un cadre à ce point de départ, en présentant les membres de la famille : le petit frère, la mère d'abord célibataire, puis nouvellement en couple, et, donc, le nouveau compagnon qui joue le rôle du père à la maison. 

Mais le jour où ce beau-père rentre dans la salle de bains pendant que Mia se douche, elle est gênée. De gênée, elle devient méfiante : en effet, la situation se reproduit. Jusqu'à ce que le doute ne soit plus permis, ni pour elle, ni pour le lecteur. Sauf qu'évidemment, Mia n'est encore qu'une enfant, aux prises avec une situation très compliquée, source de honte, de culpabilité, d'incertitude. Le lecteur, lui seul, est capable de mettre les mots d'abus sexuel sur la chose. Mia ne le peut pas. Tout ce qu'elle sait, c'est que la vie quotidienne, qui avait l'air si simple et légère au début de l'histoire, a viré pour elle au cauchemar. 

C'est la force de ce récit : amener ce thème très dur (non seulement l'abus sexuel, mais au sein de la famille, qui plus est) par un enchaînement de faits, vus comme ils peuvent être vus par une jeune adolescente. Elle n'est ni plus bête, ni plus mûre qu'une autre fille de son âge. Elle sait qu'il y a des choses qui ne se font pas, mais elle ne sait pas comment agir. Elle veut à la fois protéger (sa mère, son petit frère) et être protégée. Elle trouve des stratagèmes, comme d'aller se doucher chez sa grand-mère, qui peuvent paraître bien futiles mais représentent son seul bouclier. 

La fin est ce qu'elle doit être : positive pour véhiculer un message d'espoir aux jeunes lecteurs. Ce n'est pas tellement cela qui m'a gênée, mais la manière dont les choses se déroulent : un peu trop simples pour être réalistes. Cela correspond, certes, au ton donné par le récit, mais j'aurais apprécié un peu plus de nuances, sans supprimer la happy end, pour montrer qu'une solution existe, même si elle passe par une succession d'étapes. 

Hormis les toutes dernières pages, donc, j'ai trouvé ce roman très réussi et moins simpliste qu'il n'en a l'air dans les premières pages. A mettre entre toutes les mains, y compris les plus jeunes. 

13 juin 2016

Musée en herbe : L'art et le chat

 

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De l'art qui pense, de l'art qui réfléchit, de l'art qui fait rire : c'est un peu tout ça à la fois, L'art et le chat.

Depuis longtemps, Geluck aime glisser des clins d'oeil aux grandes oeuvres artistiques dans ses non moins célèbres bandes dessinées. Mais Geluck est plus qu'un dessinateur doublé d'un (très) bon scénariste : c'est un artiste à part entière, qui réalise des acryliques, des bronze, des statues... Tout a commencé en 2003 avec une Joconde une énième fois détournée. Loin de s'arrêter là, Geluck a enchaîné les réalisations humoristiques autour des oeuvres incontournables et de son "panthéon personnel". 

C'est donc très logiquement que toutes ces réalisations se retrouvent aujourd'hui exposées, et surtout, exposées aux côtés des oeuvres qui les ont inspirées. Si un grand nombre de ces dernières sont des reproductions, plusieurs musées ou collectionneurs particuliers ont joué le jeu et prêté tableaux et sculptures. C'est donc à un véritable cours d'histoire de l'art que le musée en herbe (toujours tourné vers l'enfance et la pédagogie) invite ses visiteurs. Les oeuvres de Geluck jouent pleinement leur rôle : capter notre attention par leur humour irrésistible, et guider notre regard vers l'oeuvre originale, dans laquelle on lit des détails ou des aspects qu'on n'avait pas toujours remarqués. Surtout, ce bon vieux Chat nous oblige à nous interroger sur les intentions de l'artiste, et, plus largement, sur la fonction d'une oeuvre d'art. Mais en a-t-elle toujours, finalement ?...

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En tout cas, si le Chat voulait nous faire comprendre que l'art, ça ne sert plus à rien, et que ça n'intéresse plus personne, eh ben c'est raté ! Preuve en est le nombre de visiteurs présent dans le (tout petit) musée, même un jour de semaine. Mettez un groupe de scolaires, avec leurs animateurs, quelques familles, des adultes, on est vite serrés au 23 rue de l'Arbre sec. C'est le seul bémol que je soulignerai pour cette exposition : un espace un peu trop restreint pour profiter de certaines oeuvres (notamment le Vasarely qui demande un peu de profondeur pour s'apprécier pleinement). 

C'est pourquoi je profite de cet article pour vous conseiller également (au plein sens du terme, c'est-à-dire "à part égale") l'album de l'exposition, paru chez Casterman au format BD, qui prendra naturellement place à côté de votre collection du Chat. Toutes les oeuvres y sont, avec quelques explications sobres mais efficaces, une interview de Geluck en début d'ouvrage. De quoi (re)faire l'expo chez vous, confortablement assis dans votre canapé, entre petits et grands, fervents amateurs d'art ou novices avides de découvertes ! 

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Exposition L'art et le chat
Musée en Herbe (23 rue de l'Arbre Sec, 75001 Paris)
Du 11 février au 31 août 2016
Plein tarif : 6€ (différents tarifs avec visites ou animations)
Tous les jours avec nocturne le jeudi. 

12 juin 2016

Du français et des jeux

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Vous êtes professeur de français et vous cherchez à occuper intelligemment vos dernières heures de cours de l’année (ou à récompenser des classes sympathiquement, en restant dans votre domaine de compétence).

Vous êtes parent et vous voulez faire travailler vos enfants sans qu’ils ne s’en rendent compte.
Vous êtes joueur et vous avez envie de tester vos compétences en langue française, en culture littéraire, en lecture…
Dans tous les cas, cet article est fait pour vous.

Une fois n’est pas coutume, la petite Mu a concocté un petit diaporama pour vous présenter ces jeux qu’elle utilise en classe, avec leurs avantages et leurs inconvénients (et même, parce que la petite Mu est serviable, les parades à ces inconvénients). A visualiser en suivant ce lien : Diapo_Jeux_en_fran_ais

Deux catégories : les jeux du commerce (en restant dans une gamme de jeux pas chers et faciles à prendre en main) et les jeux « faits maison », piochés sur certains sites pédagogiques, notamment Mon école, d’Orphys, ou créés d’un bout à l’autre par votre humble servante, parfois aidée de ses élèves ou collègues.

N’hésitez pas à me contacter via ma messagerie (Contacter l'auteur,tout en haut à droite) pour toute question ou remarque.

Ludiquement vôtre !

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9 juin 2016

Jarvis : Devine qui ? Mon imagier des émotions

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Le langage des émotions, c'est très important, et pas seulement pour les tout-petits. Le récent film de Disney/Pixar, Vice-versa, s'il a plu aux enfants, a provoqué chez les adultes (en tout cas, chez mon entourage et moi) de longues discussions : mais combien il y en a, d'émotions, en tout ? Vous êtes sûrs que le dégoût, c'est une émotion ? Et comment ça se fait qu'il y a tant d'émotions négatives pour si peu de positives ?... Etc, etc. J'avais trouvé très intelligent cette représentation des émotions, toutes présentes chez n'importe quel individu, mais avec un "dosage" différent, en quelque sorte. On se questionne forcément en sortant du film : et moi, mon émotion dominante, ce serait laquelle ?

Bref, chez les plus jeunes, l'enjeu majeur, c'est de leur apprendre non seulement à reconnaître leurs émotions, mais aussi à mettre des mots dessus. Pas seulement pour faire de jolies rédactions (ça, c'est l'objectif des professeurs de français, mais heureusement, il n'y a pas que les cours de français dans la vie), mais surtout pour pouvoir communiquer, extérioriser, et démêler cette abominable pelote qui nous empêche parfois de vivre.

J'ai donc beaucoup aimé cet album, qui est bien plus qu'un simple imagier. D'abord parce que les émotions ne sont pas simplement cataloguées, mais mises en scène : chaque double page présente une scène de la vie d'un enfant, du réveil à l'école en passant par le bus ou la fête d'anniversaire. On retrouve à chaque fois plein de personnages, et chacun d'entre eux vit la situation de manière différente. C'est là qu'on retrouve les fameuses émotions : l'auteur en a listé douze, présentes sous forme d'adjectifs. Les personnages sont amusés, inquiets, jaloux, impatients... Cela a l'avantage de permettre aux enfants d'être dans la nuance. En théorie, l'impatience se retrouve dans la colère. Mais, à l'ère où la précision et la différenciation du vocabulaire semblent tellement difficiles, il est indispensable de ne pas l'appauvrir et d'apprendre les distinctions entre les mots, fussent-ils très proches.

Au-delà de la mise en scène, c'est l'interactivité de l'album qui est intéressante. Et quand je parle d'interactivité, on n'est pas dans le numérique, dans le sonore, ni même le tactile. On revient au sens propre du terme : l'enfant va interagir avec le livre (ou, plus probablement, avec la personne qui va lui lire les textes), car c'est à lui qu'on demande, à chaque fois, "Qui est amusé ?", "Qui est en colère ?", "Qui est timide ?". A l'enfant de pointer le personnage concerné, donc, de faire le lien entre les mots et les images. J'ai une seule réserve à ce sujet : je trouve les dessins mignons et amusants, mais je les trouve parfois imprécis, notamment dans certaines expressions du visage, et je me suis demandé si cela allait être si facile pour un enfant de retrouver la bonne émotion. Mais je me trompe peut-être.

En tout cas, un principe simple mais efficace pour travailler sur le langage et aussi sur soi-même. Peut-être l'observation de certaines scènes en particulier peut permettre de défaire certains blocages, qui pourraient apparaître à certaines étapes de la vie d'un enfant (les premiers jours à l'école, la première invitation chez des amis, le moment du repas...) Pour conclure cette découverte, je suis tombée sur un blog qui m'a paru riche de découvertes et d'analyses en littérature jeunesse. Sur cette page, vous trouverez d'autres idées de livres sur les émotions, dont deux nouveautés, qui me tentent bien.

Auteur et illustrateur : Jarvis
Editions Milan
2016

Neo-défi lecture 2016 : Un livre dont le thème est la musique. (Comment ça, trop facile ?...)

6 juin 2016

Livre musical : Les instruments du Brésil

 

Les instruments du Brésil

Les éditions Didier Jeunesse proposent toute une série d'albums destinés à faire découvrir aux plus jeunes des instruments d'ici et d'ailleurs. Ma collaboration avec cet éditeur me permet donc, à moi aussi, d'enrichir ma culture musicale, et c'est tant mieux ! 

Voici donc les instruments du Brésil. On les découvre grâce au CD qui propose des sons et des musiques. Pour chaque instrument, il y a une piste qui permet de découvrir le son produit par l'instrument. Une double page illustrée accompagne l'écoute. L'auteur pose la question (à l'oral sur le CD et à l'écrit sur le livre) à l'enfant : quel est cet instrument ? Devine ! Quand j'ai ouvert la première double page, j'ai été un peu surprise. L'instrument en question, le pandeiro (un cousin du tambourin, qui s'avère être l'instrument de prédilection de la musique brésilienne), m'était inconnu ; sans présager de la culture musicale de nos bambins, je pense qu'ils seront rares à pouvoir mettre un nom dessus. Je me demande donc comment utiliser l'interaction que propose la question. Peut-être en montrant les dessins de la dernière page, qui liste tous les instruments présentés dans le livre ? C'est plus facile pour les deuxième et quatrième instruments : une guitare, une flûte, peut-être certains musiciens en herbe les reconnaîtront. Quant aux deux autres, le rebolo et la cuica, là encore, ces instruments typiquement brésiliens seront certainement nouveaux pour les auditeurs. 

En tout cas, les pistes de découverte sont très sympathiques et rigolotes. Elles apprennent aux enfants qu'un instrument peut révéler de nombreuses possibilités, qu'on peut vraiment jouer avec, au sens propre. J'avoue que ça donne envie d'avoir une flûte ou un tambour (pardon, un rebolo) entre les mains. La piste de la cuica est magique ! Ensuite, une deuxième piste rend la chose plus "musicale" : un vrai morceau (composition originale) qui montre à quel point la musique brésilienne est rythmée et festive. Tout se finit par une samba polyphonique, tous instruments confondus, où l'on peut s'amuser à retrouver les sons spécifiques à chacun, ou tout simplement danser, fredonner, taper des mains. 

Un peu déçue, donc, par l'interactivité que je trouve limitée, très convaincue par le voyage sonore proposé à travers les images, les sons, les noms. Principal regret : la collection est encore toute jeune, il n'y a que deux autres titres. J'ai hâte de pouvoir voyager ailleurs dans le monde ! 

Suite de ma collaboration avec les éditions Didier Jeunesse

4 juin 2016

Des suites et des fins, épisode 3 : Suzanne Collins, Hunger games, La révolte

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Pas de début chez la petite Mu : j'ai attendu d'avoir lu les trois tomes pour plumer sur cette trilogie.

Je suis passée à côté du phénomène Hunger games, aussi bien à la sortie des livres qu'à celle des films. Les rares extraits, en images, que j'en avais vus, essentiellement des scènes de combat, m'avaient fait dire : mouais. Mais après avoir regardé, un peu par hasard, le deuxième film, l'envie m'a prise de regarder le troisième, puis, en attendant le dernier, de lire l'histoire depuis le début.

De nombreux ingrédients étaient faits pour me plaire :

- une bonne vieille contre-utopie bien ficelée, avec un gouvernement tout-puissant, des lois cruelles destinées à maintenir la peur, et donc l'ordre et la discipline, et, bien sûr, une rébellion qui entre en marche ;

- un univers mi-futuriste, mi-archaïque, une façon de montrer que le futur peut ne pas être signe de progrès ; ou, en tout cas, que la profondeur des inégalités peut faire avancer les uns mais reculer les autres ;

- des héros jeunes mais pas trop, propices à l'identification tout en restant crédibles ;

- une belle histoire d'amouuuuuuur ;

- des relations complexes, parfois ambiguës, entre les personnages.

Tout cela, on l'a dans les films comme dans les livres. Mais, comme trop souvent dans les adaptations (je vous en ai déjà parlé), c'est la construction psychologique des personnages qui s'avère bien en dessous des romans. Jennifer Lawrence campe une Katniss qui a de l'allure, certes, mais qui reste très plate par rapport à son modèle littéraire. En lisant le premier tome, j'ai découvert une héroïne bien plus complexe que dans les films. Katniss est à la fois fougueuse et sage, révoltée et résignée. Le point de vue interne choisi pour les romans permet de comprendre qu'elle n'est en rien une rebelle acquise à la cause depuis toujours, mais juste une adolescente prête à défendre farouchement ses intérêts et la vie de sa petite soeur. Elle a un mal fou à faire confiance, y compris à sa propre mère, se montre parfois naïve, parfois orgueilleuse, bref, pas du tout l'héroïne lisse et belle qu'on veut nous faire admirer dans les films. Peut-être que le jeu de Jennifer Lawrence cherche à montrer à quel point Katniss est inaccessible pour son entourage ; mais du coup, l'histoire perd beaucoup de son intérêt. J'ai trouvé, en effet, que la première grande originalité de cette trilogie tenait en la présentation d'une héroïne qui lutte pendant presque deux tomes pour ne pas entrer dans le jeu des rebelles.

L'histoire d'amour est également plus puissante dans les livres, car on y voit toute l'ampleur du dilemme auquel Katniss est soumise. Son coeur oscille sans cesse entre Gale, l'ami de toujours, et Peeta, l'amant des jeux. Certes, le triangle amoureux, ce n'est pas nouveau, dans la littérature, mais, quand c'est bien raconté, ça marche à tous les coups. Jusqu'à la fin du dernier tome, on ne peut affirmer catégoriquement le choix que Katniss fera quant à sa vie sentimentale. Elle pourrait tout aussi bien finir sa vie seule, tant elle lutte contre ses sentiments à de multiples reprises. Le personnage de Peeta est intéressant, contrasté lui aussi.

Le principe des jeux est assez fascinant, car il permet de mêler action et réflexion. [Attention : paragraphe spécial profs] Amis enseignants en quête de parallèles signifiants entre univers littéraires et cinématographiques d'aujourd'hui et mythes et civilisations d'hier, Hunger games est fait pour vous ! Je n'irais pas jusqu'à travailler en classe sur les extraits des livres, sauf peut-être pour travailler sur les points de vue, mais des extraits des films, ou une étude générale après lecture cursive de la trilogie, pourquoi pas. A mettre en relation avec la décadence de l'Empire romain (il y a un passage, assez tardif, dans le troisième tome, où Katniss apprend que "Panem", le nom de leur monde, est le début de l'expression "Panem et circenses") et la question universelle et intemporelle du sacrifice. Pensons aussi à d'autres films de science-fiction qui aiment utiliser des traditions antiques : par exemple la scène de l'arène dans Star Wars, épisode II, L'Attaque des clones, quand Anakin et Obi-Wan se battent contre des créatures dressées pour tuer, sous les yeux d'un public ravi par ces affrontements. Et n'oublions pas Le combat d'hiver, le roman de Jean-Claude Mourlevat, dans lequel des personnages sont aussi dressés pour tuer, y compris leurs propres camarades, dans des combats se déroulant également dans une arène et en public. Voici quelques idées à exploiter pour les nouveaux programmes (le roman d'anticipation y apparaît en 5e, mais peut aussi être judicieusement utilisé en 3e, pour le thème complémentaire), permettant de lier littérature, cinéma et civilisations de l'Antiquité. [Fin du paragraphe spécial profs]

Ce billet avait initialement pour but de parler du dernier tome de la trilogie. Je l'attendais avec impatience (réservé dans ma médiathèque, j'ai mis plus d'un mois à l'obtenir, pourtant il n'est pas nouveau ; le phénomène est donc loin d'être fini même si tous les films sont maintenant sortis), même si je connaissais les faits relatés dans la première moitié du livre, puisque j'avais vu le troisième film. (Rappelons que, comme pour Harry Potter d'ailleurs, le dernier livre a été adapté en deux films). J'ai d'abord été surprise par la noirceur plus prégnante que dans le film. Notamment, le personnage de la présidence Coin apparaît beaucoup moins rassurante, douce et fiable qu'elle ne l'est dans les films. Le désespoir de Katniss quant à la fin de la guerre, à ses relations avec Peeta (dont on a bourré le crâne au Capitole pour qu'il n'éprouve que de la haine envers Katniss), à son avenir tout simplement, est très présent. Quant à la deuxième moitié de l'histoire, elle est riche en actions, encore plus noire (ne pas s'attacher aux personnages...), au point qu'on se demande s'il pourra même y avoir une fin à l'histoire. Il y en a bel et bien une, pas tellement surprenante, plutôt de l'ordre de l'inévitable, mais qui colle bien à ce qu'on sait des personnages. Les ultimes pages "vingt ans plus tard", bon, on aurait pu s'en passer ; de même que dans Harry Potter, ça n'apporte pas grand-chose.

Finalement, j'ai beaucoup aimé le premier livre (pas encore vu le premier film), aimé assez également le deuxième livre et le deuxième film, un peu moins aimé le dernier livre, mais toujours plus que l'avant-dernier film (et pas encore vu le tout dernier). (Si vous n'avez rien compris à cette phrase, je comprends.) Mais, au demeurant, un nouvel univers d'anticipation riche et prenant, dont les livres ne tombent pas dans des facilités d'écriture, qu'on peut donc conseiller sans honte à tous ceux qui ne les connaîtraient pas encore.

 

Neo-défi lecture 2016 : Un livre dont l'intrigue se passe dans un lieu imaginaire. 

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Le royaume de Kensuké

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